Article écrit par Abdel Fatah Lafrizi Professeur et militant de droits de l’Homme France
La Génération Z, qui regroupe aujourd’hui au Maroc les jeunes de 13 à 28 ans, n’a pas été suffisamment prise en compte dans les démarches de communication politique. Elle ne se reconnaît ni dans les discours traditionnels, ni dans les méthodes classiques des institutions. C’est une erreur stratégique majeure.
Cette jeunesse ultra-connectée vit dans l’instantanéité, valorise l’authenticité, rejette la langue de bois et exige des preuves tangibles. Elle attend des responsables politiques non pas des promesses lointaines, mais des réponses immédiates, adaptées à chaque secteur : santé, éducation, emploi, gouvernance.
Une communication dépassée
Les responsables politiques marocains continuent souvent d’utiliser les canaux classiques : conférences de presse, longs communiqués, interventions télévisées figées. Mais ces formats ne touchent pas la Génération Z, qui s’informe et s’exprime sur TikTok, Instagram, YouTube, Discord ou encore Twitch.
Or, continuer à ignorer ces espaces numériques revient à laisser le champ libre à d’autres voix – parfois désinformées ou extrémistes – qui savent, elles, parler le langage de cette génération.
Trois ruptures nécessaires
Du vertical à l’horizontal : la Génération Z rejette le discours descendant. Elle veut être associée, consultée et intégrée. Le dialogue doit être participatif, interactif, et parfois même coconstruit.
De l’opacité à la transparence : chaque décision publique doit être expliquée simplement, chiffres à l’appui. Cette génération vérifie, compare et dénonce immédiatement toute incohérence.
De la promesse à l’action visible : les responsables doivent montrer des résultats concrets, rapides et mesurables. Le temps long de l’administration ne correspond pas au temps court du numérique.
De nouveaux canaux, de nouvelles méthodes
Micro-contenus vidéo : messages clairs et courts diffusés sur TikTok, Reels Instagram ou YouTube Shorts.
Lives interactifs : sessions régulières sur Instagram Live ou Twitch où un ministre, un maire ou un responsable répond directement aux questions des jeunes.
Espaces numériques participatifs : plateformes de consultation citoyenne adaptées aux jeunes, avec suivi public des propositions.
Narration incarnée : mettre en avant non pas l’institution mais l’humain : un responsable qui parle sans filtre, qui raconte, qui écoute.
Une obligation d’action immédiate
Les jeunes n’attendront pas que les responsables politiques « trouvent le bon moment ». Ils réclament dès maintenant :
du ministre de la Santé : un plan concret pour l’équipement des hôpitaux ;
du ministre de l’Éducation : des réformes visibles des programmes et infrastructures ;
du ministre de l’Emploi : des dispositifs efficaces d’insertion et de formation ;
du ministre de la Jeunesse : des espaces réels de dialogue et de participation ;
de tous les décideurs : une parole claire, assumée, suivie d’actes rapides.
Ne pas répondre équivaut à creuser la rupture générationnelle et à nourrir une défiance durable.
En conclusion, la nécessité d’une réponse stratégique s’impose : il appartient aux responsables politiques d’ouvrir un dialogue constructif avec la Génération Z, en prenant le temps d’écouter, de comprendre, puis de s’exprimer avec clarté. Cela implique une refonte des discours, une modernisation des canaux de communication, et une réactivité sans faille
La Génération Z n’est pas une menace. C’est un partenaire incontournable pour l’avenir du Maroc. Mais pour qu’elle joue son rôle, les responsables politiques doivent revoir leur façon de communiquer et surtout, leur manière d’agir.
La communication politique de demain doit être :
authentique plutôt que formatée,
digitale plutôt que bureaucratique,
interactive plutôt que descendante,
immédiate et concrète plutôt que différée et vague.
Le temps n’est plus aux slogans.
Le temps est à l’écoute, à l’action et à la transparence.
C’est à ce prix que le dialogue avec la Génération Z pourra devenir un moteur de stabilité, de confiance et de transformation durable du pays
